Être francophone: je «parle», donc je «suis»…?
Qu’est-ce que l’identité francophone? Lorsqu’on se dit francophone, qu’affirme-t-on exactement? Que l’on parle français? Il semble que de se poser la question amène en fait une réponse beaucoup plus vaste et nuancée… et d’autant plus intéressante.
C’est ce qu’a révélé un vox pop vidéo réalisé auprès d’un groupe d’intervenants scolaires dans le cadre de leur participation aux Stages de perfectionnement de l’ACELF.
Quelque chose de personnel
Avant même de parler d’identité francophone, ou de francité, la question oblige à s’arrêter sur ce qu’est l’identité tout court. Il ressort de la majorité des témoignages qu’il s’agit d’abord de quelque chose de très personnel, que chaque personne définit pour elle-même. «On ne peut pas imposer une identité», affirme Valérie Meilleur, enseignante à l’école élémentaire catholique Élisabeth-Bruyère en Ontario.
Ne pas imposer une identité signifie peut-être aussi faire fi, pour un moment, de nos termes les plus connus… pour laisser place à l’unicité de chacun. Suis-je francophone? Franco-Manitobain? Bilingue? Anglophone qui parle français? «Je ne fournis pas ces choix-là à mes élèves», explique Stéphany Halikas, qui enseigne à l’école Saint-Joachim, au Manitoba. «Je leur demande plutôt de choisir eux-mêmes des mots qui les identifient.»
Quelque chose en mouvement
L’identité est aussi perçue par la plupart comme quelque chose qui n’est pas fixe. Lorsque Jeanne Duquette, accompagnatrice aux stages de l’ACELF, invite les intervenants scolaires à discuter de ce qu’est pour eux l’identité, les réponses passent rapidement de c’est qui je suis, c’est mon nom, à une définition moins tangible, mais plus souple et plus ouverte : «Ils en viennent à dire que l’identité, ce n’est pas stable, explique-t-elle. On ne naît pas avec une identité pour continuer avec la même identité… il y a toute une évolution.»
Quelque chose de multiple
Enfin, bien que chacun ait sa propre représentation de l’identité, il semble y avoir consensus sur le fait que celle-ci regroupe plusieurs éléments. Certains parlent d’une identité multiple, ou de plusieurs identités. C’est le cas, entre autres, de Nezha Saffaf, éducatrice au programme Franc départ en Colombie-Britannique : «Je me considère comme une personne qui a deux identités : arabophone et francophone.»
Valérie Meilleur, de son côté, se représente l’identité comme un casse-tête formé de plusieurs morceaux qui composent un tout en mouvement. C’est donc dire qu’identité semble aller de pair avec diversité. Mais il s’agit ici d’une diversité qui, avant d’être extérieure, serait d’abord intérieure… au cœur de la personne.
S’identifier comme francophone
Si l’identité évolue constamment, c’est sans doute parce que la personne ne vit pas sa démarche identitaire en vase clos: il y a interaction avec d’autres personnes et avec divers milieux. Cela devient évident lorsqu’on demande aux intervenants de répondre à la question «qu’est-ce que l’identité francophone». Pour la plupart d’entre eux, « le fait de parler français » n’est pas une définition complète de l’identité francophone. La langue joue un rôle, certes, mais il y a aussi une dimension culturelle qui entre en jeu : «Il faut que j’aie vécu des expériences en francophonie, il faut que je me reconnaisse parmi les francophones pour pouvoir vraiment dire que je construis mon identité francophone», explique Jeanne Duquette. «Parler en français, oui, mais c’est vivre en français… Il y a tout un aspect culturel à être francophone.»
Le modèle de la construction identitaire
En d’autres mots, c’est au cœur d’un échange dynamique que tout cela se passe. Le modèle de la construction identitaire, élaboré par l’ACELF, fait précisément référence à cet échange par ce qu’il nomme «les passerelles d’interaction»: par sa faculté à réfléchir, à agir et à vouloir, la personne en démarche identitaire interagit avec les contextes sociaux dans lesquels elle évolue, et vice-versa. Ce processus vivant, multidirectionnel et dynamique, c’est cela, la construction identitaire.
Plongez au cœur d’une francophonie contemporaine, diversifiée et rassembleuse
S’identifier comme francophone, c’est parler en français, mais c’est aussi «vivre en français», pour reprendre les mots de Jeanne Duquette. D’ailleurs elle conclut en invitant les intervenants scolaires à discuter entre eux, de ce que signifient identité et francité.
Les intervenants en éducation interpellés par ce type de réflexion peuvent vivre une expérience unique en francophonie : les Stages de perfectionnement de l’ACELF. Cette formation professionnelle, donnée à Québec par des experts du milieu éducatif de langue française, offre aux participants huit jours d’échanges et d’apprentissages au contact d’autres francophones du Canada et des Amériques. Les stagiaires repartent non seulement équipés de nouvelles ressources, mais aussi transformés par de riches expériences personnelles qui marqueront durablement leur identité en tant que francophones.
La francosphère en action
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